Nous sommes en plein cœur de la ville de Cotonou, dans le plus grand marché d’Afrique de l’Ouest. Un marché avec une foule énorme, où il y a une diversité d’opportunités pour les divers commerçants et ceux qui veulent se faire un bon chiffre d’affaires. Nous sommes au marché Dantokpa situé au sud du Bénin. Ici, le marché s’anime tous les cinq jours, quand bien même l’atmosphère soit pareille même les jours ordinaires.
Il était treize heures passées de quarante minutes ce samedi 28 janvier 2023. En ce moment précis de la journée, le grand marché battait son plein. Les rayons de soleil de leur altitude zénithale ne semblaient pas affecter la chaleur étouffante qui régnait aux alentours. Les cris des vendeuses qui offraient leurs produits et les « ago-ago », appelant les clients à céder le passage, s’entremêlaient. Légumes, condiments, friperies, ustensiles de cuisines, accessoires de beauté, etc, tout était à disposition et à portée de prix. La voie aller-retour était encombrée de pousse-pousseurs et les aller, où l’on devrait se frayer un chemin, n’étaient pas accessibles. Dans ce tohu-bohu, des cris assourdissants « Pur Water Fifa ! » ou encore, « Tata, voici des vêtements à 300f », retiennent l’attention. Le constat est surprenant ! Des enfants de tout âge, de famille différente, avec chacun diverses marchandises, se faufilent entre les étalages et usagers de la route pour essayer d’écouler leurs produits. Dans tout le marché, il y en a bien plus. C’est clair, malgré toutes les dispositions prises par le gouvernement et les organisations internationales, l’exploitation économique des enfants est toujours une réalité, surtout au marché Dantokpa. En témoigne Fifamè, âgée de 10 ans, aperçue par une équipe de DBMEDIAS avec des sachets d’eau fraiche dans une forme de bassine. « Je suis là depuis le matin et j’ai déjà fait trois tours. Je prie que ceci finisse vite pour aller prendre encore » nous a confié la fillette habillée d’un ensemble bomba aux chemises très décolletées avec à sa tête des nattes datant de plusieurs mois. Elle ajoute « je peux faire beaucoup de tours dans la journée. Ça dépend du marché. Des fois, je fais jusqu’à sept tours comme ça par jour ».
Trouver un autre ‘’petit commerçant’’ n’a pas été un supplice tant ils sortent du dédale de ruelles l’un après l’autre chargé de marchandises. À quelques pas de Fifamè, se trouve Pascaline avec à la tête des amuses bouches attachées dans des sachets qu’elle vend à 100f l’unité. Elle gardait à la main un sachet de yaourt qu’elle suçait en discutant avec une de ses ‘’collègues’’. La petite fille de 12 ans a fait savoir qu’elle a bien « vendu aujourd’hui comme c’est samedi. C’est pourquoi je suis en joie ». Contrairement à ces rares enfants, qui arborent un visage de gaîté dans l’exercice de leur travail, d’autres, montrent qu’ils vivent des moments de cauchemars. C’est le cas de Sandrine. Assise la main au menton, indifférente à ce qui se passe autour d’elle, elle semble perdue dans ses pensées. Approchée pour s’enquérir de ce qui peut bien la mettre dans cet état, c’est en sanglots que celle-ci confie en langue fongbé. Elle raconte avoir emprunté de l’argent à une amie qui n’a pas pu lui rembourser. « Si je savais ! je ne sais pas comment faire maintenant. Maman est à la maison, je dois lui faire le point et prendre autre » regrette-t-elle. « On va me tuer. Awootchoo je suis foutue » martèle Sandrine qui visiblement à une tutrice pas très gentille.
Odéniatou BAWA